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Auteur, un métier ?
"Ecrivain, ça n'est pas un métier." "Musicien, ça n'est pas un métier". "Artiste, ça n'est pas un métier. Tout juste une occupation." En 2007, on peut encore entendre ce type de discours. Quelquefois prononcé par les artistes eux-mêmes. Si les intermittents du spectacle ont su par le passé s'unir pour défendre leurs professions, cela n'a à ma connaissance jamais été le cas des auteurs en France. Il serait peut-être temps que les mentalités concernant les métiers artistiques, et en particulier celui d'auteur, évoluent. Tout d'abord, pourquoi est-ce important que la société dans son ensemble, et les artistes eux-mêmes, se mettent à considérer ce qu'ils font comme un véritable métier ? Tout simplement parce qu'un métier qui se transforme en activité rémunérée apporte outre le revenu lui-même certains bienfaits, bienfaits dont toute personne qui a connu le chômage et retrouvé un emploi pourrait parler. Le statut social, par exemple, et avec lui car à mon avis cela lui est intimement lié, la raison d'exister. Eh oui, nous sommes avant tout des animaux sociaux, et dans l'ensemble, nous avons besoin que notre activité soit légitimée par la société. Je dis dans l'ensemble, car il existera bien évidemment des contre-exemples. Des artistes dont la confiance en eux est suffisamment forte pour qu'à aucun moment dans leur vie ils n'aient besoin d'être reconnus pour ce qu'ils font. Ou encore, des personnes qui ont appris à reconnaître ce qu'était la pression sociale et à la combattre. Car le fait de devoir gagner sa vie de manière déclarée afin d'être utile à la société en côtisant aux différentes caisses d'allocation sociale, principe tout à fait sensé et noble dans l'absolu, génère des mécanismes de pression. Il donne à penser que tout ceux qui ne participent pas de cet effort collectif sont des fainéants ou bien n'ont pas de véritable métier. Beaucoup d'artistes ont un métier et une activité non rémunérée, activité qui va peut-être un jour leur rapporter quelque chose mais qui jusque-là ne se transformera pas en emploi au sens strict du terme. On a tendance à confondre emploi et métier, ce qui n'arrange pas les choses. N'oublions surtout pas non plus les tendances lourdes issues des nombreux siècles où l'homme devait impérativement avoir une activité physique pour assurer sa subsistance de manière directe : travailler aux champs, couper du bois, aller à la mine, etc. Aujourd'hui, pour le meilleur et le pire, le monde s'est complexifié. On peut être publicitaire, travailler deux heures par jour, être payé 5000 euros par mois et être tout à fait reconnu comme un élément actif, productif et solidaire de la société. On peut être agriculteur, bosser d'arrache-pied et arriver tout juste à joindre les deux bouts. Assistante maternelle n'était jusqu'à il y a quelques temps pas considéré comme un véritable métier. Dans ce dernier cas, il y a eu évolution, et l'évolution légale va à mon avis entraîner une évolution (lente, certes) des mentalités. On peut aussi être auteur, travailler des années pour développer son talent et n'en tirer aucune reconnaissance sociale et pratiquement aucun revenu. J'ai pourtant la faiblesse de penser que les auteurs sont un peu comme des géologues ou des chercheurs. Ils prospectent, fouillent, ne trouvent pas toujours. Quelquefois, ce qu'ils trouvent ne suscitera d'intérêt que dix ans plus tard. Ou un siècle. Mais parfois, ils dégotent la pépite qui fera immédiatement le tour du monde et leur vaudra de ne plus avoir à craindre pour leurs vieux jours. Comme J.K. Rowling avec Harry Potter. Est-ce que J.K. Rowling ou Madonna sont considérées comme des professionnelles au même titre qu'un médecin ou un avocat ? Peut-être, mais j'ai surtout l'impression que beaucoup les regardent comme les gagnantes d'un billet de loterie ou de la roue de la fortune. C'est évidemment une manière simple d'oublier leur professionnalisme à toutes deux, mais aussi celui de tous les artistes, auteurs, chanteurs, comédiens, musiciens et autres qui travaillent dans l'ombre sans pratiquement être rémunérés. Il faudrait pourtant ne pas oublier que ceux qui s'engagent dans un métier d'auteur ou un métier artistique et qui développent pour cela des compétences n'ont pas tous forcément envie de miser leur vie sur un coup de dés. S'il existe des pépites, c'est que la société a tout de même besoin de ces pépites. Et s'il y avait beaucoup moins de monde à chercher ces pépites, on en trouverait beaucoup moins et de moindre qualité. Les pépites elles-mêmes ne génèreraient pas autant d'activité économiques annexes et produits dérivés. Alors, faut-il laisser le marché se gérer lui-même en la matière ? Je ne le crois pas. La politique ne résout pas tout, mais elle peut parfois faire évoluer les mentalités. Dans la recherche comme dans le domaine artistique, la politique à courte vue, quand il ne s'agit pas carrément d'absence de véritable politique culturelle, n'est pas un facteur de progrès mais de régression.
Le Revenu Minimum d'Ecriture Lundi 19 novembre 2007 Un peu avant les élections présidentielles, le site fluctuat.net relançait l'idée qui à mon avis ne date pas d'hier d'un revenu minimum d'écriture. 400 euros par mois pour quiconque peut faire la preuve d'un certain nombre de pages écrites annuellement. Non cumulable avec le RMI, évidemment. Mais "le RME pourrait (...) être cumulé dans une proportion à déterminer avec une activité commerciale ou d'intérêt général (cours du soir, soutien scolaire, travaux d'écrivains publics)." Une mesure qualifiée d'"imbécile", le billet l'évoquant sous le couvert d'un tag "élucubrations". Le ton du billet est d'ailleurs assez ironique. Pourtant, une telle mesure correspondrait à mon avis à une réalité. Si elle était correctement mise en oeuvre, elle pourrait aider pas mal d'auteurs actuellement au RMI à regagner dignité et une certaine indépendance. Les auteurs mariés pourraient en bénéficier également et ne plus avoir le sentiment de vivre totalement au crochet de leur moitié. Comme je le disais dans le billet précédent, ce serait une manière pour le gouvernement et à terme, la société, de reconnaître l'existence et le travail des auteurs. Ceux qui seraient au RME (j'aime aussi le terme RMA, revenu minimum d'auteur ou d'activité) n'auraient plus de travail d'insertion à faire (d'où l'indépendance), puisque leur travail d'écriture serait reconnu utile à la société, quoique (c'est le cas pour la plupart des auteurs) non rémunérateur de manière directe pour eux. L'inventeur de cette mesure, un certain Thierry Alembert, économiste de son état, demandait à ce qu'elle soit applicable à tous les auteurs "ayant au moins publié un ouvrage dans les trois dernières années". Il faudrait bien entendu que cette mesure concerne aussi les auteurs d'ouvrages autoédités et imprimés à la demande. On se rend en effet compte que les aides à l'écriture du Centre National du Livre, par exemple, qui demandent que l'on soit publié et diffusé en librairie, ne sont plus en phase avec la réalité du marché : les éditeurs, avec les offices, catalogues de livres dont ils négocient la présence en librairie en échange d'ouvrages plus vendeurs, ne laissent guère la place d'y figurer aux nombreux livres des auteurs autoédités ou même aux ouvrages des petites maisons d'édition. Une telle mesure ne devrait à mon avis pas être considérée comme une subvention, mais comme la juste rémunération du travail de ceux qui, oeuvrant dans l'ombre, cherchent à se trouver un public et à lui donner satisfaction. Car pour l'instant, la société ne tient compte que des réussites littéraires, mais pas des innombrables cafouillages et tâtonnements qui servent à produire un jour ces réussites. C'est aussi négliger qu'une réussite littéraire (même quand elle provient de l'étranger, car il ne faut pas oublier la TVA) va bénéficier à la société, de par toutes les activités annexes qu'elle génère : adaptations de romans en film, avec la fabrication ultérieure de DVD et de CD de musique qui en découlent, de jeux vidéo, de figurines ou de jouets tirés des personnages ou de l'univers du livre, de tee-shirts, sacs et tous les autres produits dérivés imaginables des licences à succès. Il serait temps que la société rende aux auteurs la monnaie de leur pièce. Il serait temps que les auteurs prennent conscience de leur utilité dans la société. Ressource : l'article sur Agoravox
Accueil Qui suis-je ? Mon blog SF Les Explorateurs Dossier de presse Les Explorateurs Revue de presse Les Explorateurs Technique d'écriture SF Fantasy Ardalia - Le Souffle d'Aoles Revue de presse Le Souffle d'Aoles Ardalia - Eau Turquoise Revue de presse Eau Turquoise Ardalia - Les Flammes de l'Immolé Revue de presse Les Flammes de l'Immolé Illustrations Le Souffle d'Aoles Le Souffle d'Aoles images complètes Littérature de genre Fantastique Offres spéciales Deux livres achetés, le troisième offert 4 livres grand format pour 50 euros Boutique Livres brochés Ebooks Ebooks Fantasy Ebooks Science Fiction Ebooks thriller/fantastique Rencontres Rencontres avec les lecteurs Autres Auteur, un métier ? Ecrire et se faire publier BD Mes liensBilan 2010 Le Souffle d'Aoles – Les Explorateurs 16 mars 2011 En France, il faut le savoir, la grande majorité des écrivains ne bénéficient pas de l'appui d'un agent littéraire susceptible de défendre leurs intérêts. A combien d'exemplaires faut-il vendre pour intéresser un agent ? 50 000, 100 000 ? Je l'ignore. Toujours est-il que lorsqu'un "jeune" auteur se présente devant un éditeur, il est le plus souvent seul. Sans agent. Sans avocat. Et vous pouvez parier que dans la plupart des cas, il n'y a même pas négociation des droits. L'auteur accepte les conditions de l'éditeur, point. J'ai eu la chance de vivre deux expériences distinctes, être édité à compte d'éditeur en 2009 aux éditions Lokomodo pour mon recueil de nouvelles Les Explorateurs , puis décider en 2010 de prendre à bras-le-corps une activité d'autoéditon pour le cycle d'Ardalia, en commençant par le premier tome, Le Souffle d'Aoles . J'en ai tiré au moins un enseignement : en l'absence d'agent littéraire, les auteurs ont tout intérêt à mener eux-mêmes leurs propres expériences de terrain, afin de savoir ce qui leur rapporte le plus en terme littéraire, mais aussi bien sûr, en monnaie sonnante et trébuchante. Car on ne vit pas que de belles lettres, il faut se le dire. Nous autres auteurs avons en outre besoin de confronter nos expérimentations. Nous avons besoin d'éléments chiffrés. De concret, pour sortir des idées reçues. Voici donc un petit exemple pratique, avec le bilan 2010 des ventes du Souffle d'Aoles et des Explorateurs . Dernière précision, si les éditions Lokomodo souhaitent un rectificatif ou un droit de réponse, qu'ils m'envoient les éléments, je les publierai ici. Nous sommes aujourd'hui le 16 mars 2011, et cela fait un an et un jour que Le Souffle d'Aoles est sorti en autoédition. Avant de parler du bilan 2010 de mes deux livres, voici donc le chiffre de vente du Souffle sur un an : 559. Ce chiffre peut paraître dérisoire. Pour moi, au contraire il représente beaucoup. C'est un accomplissement, et un accomplissement qui n'aurait pas été possible sans ma femme, Anne-Christine. Non seulement elle m'apporte de précieux conseils sur le fond et la forme en phase d'écriture, mais quand je dédicace, c'est elle qui s'occupe de nos deux enfants de trois et cinq ans. S'il y a un héros dans l'histoire, c'est une héroïne, et c'est elle. Bilan 2010 (premier janvier au 31 décembre) : Le Souffle d'Aoles (éditions Emmanuel Guillot) : 399 ventes – 2244,49 euros de bénéfice net Les Explorateurs (éditions Lokomodo) : 67 ventes – 69,66 euros de droits d'auteur On va me dire, 67 ventes, c'est catastrophique pour une société comme Lokomodo qui est éditeur et diffuseur sur le plan national. En réalité, pas du tout : Les Explorateurs s'était déjà vendu à 73 exemplaires en 2009, ce qui fait un total de 140. Les professionnels vous le diront, pour un recueil de nouvelles de science-fiction d'un auteur inconnu, c'est un chiffre acceptable. En outre, et c'est une donnée fondamentale, la prise de risque de l'éditeur a été minimale : il n'y a pas eu d'à-valoir, le premier tirage était de 100 exemplaires, et le deuxième est également de 100. A ma connaissance, Les Explorateurs a donc jusqu'à présent été rentable pour Lokomodo, et c'est une grande fierté pour moi. Bien sûr, un tirage de 100, tout de même un peu faible, n'autorise pas une très bonne marge pour l'éditeur, mais de ce côté-là, je ne peux que louer la sagesse d'une société qui entend progresser pas à pas, à son rythme. Pour ce qui me concerne, j'ai procédé par tirages de 250, mais je n'avais qu'un seul livre à gérer, et non 13 (25 à l'heure actuelle) comme Lokomodo. Là où le bât blesse, c'est donc, on l'aura compris, dans la rémunération d'auteur. Il ne faut bien évidemment pas confondre des droits d'auteur avec un bénéfice net, mais les deux ont tout de même un point commun : c'est cela qui tombe au final dans la poche de l'auteur. Avec plus de 2000 euros de bénéfices en moins d'un an, je peux avoir l'espoir de passer un jour semi-pro. Avec 70 euros, je suis désolé, non. Je sais ce qu'on va me dire : « mais dans un an, dans cinq ans, ça peut tourner. » Oui, certes. Dans un an, dans cinq ans, je peux gagner au loto, aussi. Sauf que comme je l'ai dit quelque part, je ne joue pas au loto avec mon travail. Ces chiffres en dessous des 100 euros de droits d'auteur par an, ils sont monnaie courante, si je puis dire, dans la petite ou micro-édition. Faisons maintenant un calcul un peu osé : imaginons que nous transformions ces 2244,49 euros en droits d'auteur. Mon chiffre d'affaires sur 2010 a été de 6673,54 euros après marge libraire (prélevée à la source, soit 8379 euros de CA au total), mes dépenses ont été de 4429,05 euros. Concernant ses dernières, elles ont été progressives, de 2600 euros au départ, puis ont augmenté au fil des mois. Donc, ce bénéfice de 2244,49 représenterait, si l'on est audacieux, 26,78 % de droits d'auteur. Alors, il est vrai qu'un éditeur en SARL comme Lokomodo va payer des charges, des frais de location pour gérer les stocks, des frais d'impression plus importants puisque le tirage est moindre, de la TVA… Mais ce qu'il faut savoir, c'est que pour Les Explorateurs : - la couverture a été gratuite, grâce à la générosité de l'illustratrice - il n'y a pas eu de corrections, donc pas de frais de ce côté Alors que si on prend le budget 2010 du Souffle d'Aoles , dans les dépenses, on a le versement de 800 euros à l'illustrateur (pour les deux couvertures, celle du Souffle et de la suite, Eau Turquoise à paraître en avril 2011), plus 200 euros de frais d'huissier pour le concours d'illustrations. Soit 1000 euros. Donc, c'est vrai qu'en tant qu'autoéditeur, je ne paie pas la TVA, c'est vrai que je n'ai pas non plus eu de frais de correction ni de maquette (j'ai réalisé celle-ci moi-même), mais grosso modo, on peut penser que les fortes dépenses en 2010 compensent le fait que je ne paye ni charge ni TVA. Quels sont donc les enseignements à tirer de tous ces chiffres ? Eh bien, tout d'abord, cela met fin à une idée reçue selon laquelle un livre ne peut être rentabilisé, sauf exception, dès la première année : Le Souffle a été rentable en moins d'un an, et il y a fort à parier que Les Explorateurs aussi. D'autre part, si on avait voulu que l'éditeur répartisse équitablement les gains avec l'auteur, il aurait dû me verser 16% de droits d'auteur. Un éditeur intelligent aurait d'ailleurs tout intérêt à rémunérer encore plus largement un auteur : 20, voire 25%, pour motiver ce dernier à faire davantage de séances de dédicaces. Cela vous semble irréaliste, comme demande ? Il y a au moins une chose, en tant qu'auteurs, on devrait tous négocier : faire en sorte que les livres que nous dédicaçons, en salons, par correspondance ou ailleurs, nous soient rémunérés au minimum à 25 ou 30%. Dites-vous bien que quand vous avez écrit un livre, et que vous l'avez dédicacé, c'est vous qui avez décroché la timbale : vous avez fait au moins 90% du job. Je pense enfin, que dans le cadre de l'édition à grands volumes, il devrait y avoir un pourcentage minimal de droits d'auteur (je dirais de 25%, on ne pourrait descendre en dessous), et que les pourcentages devraient être indexés sur les ventes. Exemple, vous vendez 10 000 exemplaires ou plus sur une année, vous touchez 50% de droit d'auteur. Ce serait pour moi le pourcentage maximal sur un livre papier, parce qu'il faut aussi rémunérer les différents acteurs de la chaîne du livre. Vous en vendez 3000 l'année suivante, vous retombez à 35%. Evidemment, il serait totalement irréaliste de demander 50% sur des petits tirages la première année. Si j'avais dû le faire pour mon propre cas, je me serais retrouvé avec un déficit de 1100 euros en fin d'année. En revanche, vous pouvez demander 50% des bénéfices de l'éditeur sur votre ouvrage, mais vous perdez alors la référence par rapport au prix du livre. Si je trouve que l'autoédition, à condition qu'elle soit prise à bras-le-corps, est une bonne expérience, c'est qu'elle apprend la valeur des choses. Aux Etats-Unis, où il y a des agents littéraires, toutes les différentes parties d'un contrat sont négociées. On fait même des contrats spécifiques pour les droits audiovisuels, pour les droits d'une édition de poche ou pour les droits numériques, par exemple. En France, on fourre tout dans un même contrat, et on a de la chance si on parvient à négocier quelque chose à l'intérieur. Pour finir, le dernier conseil que j'aurais à donner, c'est : ne cédez jamais vos droits à vie (pour la durée littéraire de l'œuvre). Même si vous signez à seulement 5% (de l'esclavage, soit dit en passant), si vous avez signé pour trois ans tacitement renouvelables et que vous en vendez 10 000, après remboursement de l'à-valoir, vous serez en position de force, soit pour renégocier, soit pour démarcher d'autres éditeurs – voire les deux. P-S : pour être complet, concernant les exemplaires numériques du Souffle d'Aoles , il ne s'en est vendu que trois en 2010 et un en 2011 (trois ePub, un PDF).