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Littérature de genre : faut-il faire tomber les barrières ?
Science-Fiction, Fantasy, Fantastique
Avant-propos

Qu'est-ce que la littérature de genre ? Tout simplement les œuvres écrites auxquelles on reconnaît une finalité esthétique (définition issue du Larousse) et correspondant à des thèmes ou univers bien particuliers comme par exemple le polar, la science-fiction ou la fantasy – vous savez, ces contes de fées modernes dont l'un des représentants les plus connus n'est autre que
Harry Potter. Certaines élites intellectuelles qualifient ces genres de « paralittérature » de la même manière que l'on parle de parapsychologie : un succédané n'ayant rien avoir avec la science ou la psychologie et se constituant en réalité d'un tissu d'élucubrations. De la même manière, la littérature de genre ne serait, si l'on schématise un peu, qu'un ersatz dépourvu de tout fondement solide.

Pour les auteurs ayant conçu des œuvres appartenant aux genres en question, il peut s'avérer assez frustrant de se voir de la sorte systématiquement étiqueté et mis à l'index. D'autant que suivant les différents pays et cultures, certains genres sont considérés comme étant plus « nobles » que d'autres. Ainsi la science-fiction est-elle reconnue dans les contrées anglo-saxonnes, mais ostracisée en France… à tel point que la plupart des éditeurs français préfèrent publier des auteurs de SF anglo-saxons plutôt que des compatriotes ! A la longue, le besoin peut se faire ressentir d'échapper à cette « ghettoïsation » – ou marginalisation, si vous préférez. D'où la tentation de vouloir faire tomber les barrières entre les genres, et de ne réclamer qu'une dénomination unique : la littérature. Tant il est vrai qu'il peut paraître contraignant de s'affilier à un genre littéraire, et qu'on peut se sentir prisonnier du filet des règles et conventions préétablies.

Quelles qu'en soient les raisons en tout cas, la tendance à vouloir jeter des passerelles entre genres littéraires existe déjà bel et bien. Ce
site internet recense quelques-unes de ces jonctions tout en donnant un assez bon aperçu des principaux genres. Or, il existe de nombreuses autres correspondances, comme l'attestent plusieurs exemples développés dans cet article. Il sera ici question non seulement de littérature, mais aussi de cinéma, de séries télévisées, de jeux vidéos et de bandes dessinées. Autant de différentes formes artistiques au sens large du terme qui contribuent aujourd'hui à l'évolution de la littérature de genre en suggérant de nouvelles idées aux auteurs ou plus prosaïquement en fonction des novélisations qu'elles engendrent. En fin d'article, j'expliquerai quelle a été ma démarche vis-à-vis de la littérature de genres en écrivant mon recueil de nouvelles, Espace et Spasmes.

Les exemples suivants ne prétendent évidemment en aucune façon à l'exhaustivité.


Jules Verne

Jules Verne est dit-on, l'un des pères fondateurs de la science-fiction. Il est vrai que les inventions tirées de son imagination et des sources documentaires collectées auprès des ingénieurs et scientifiques de son temps étaient très en avance sur son époque. La technologie se trouve donc très présente dans son œuvre, ce qui n'a pas empêché ce fils aîné d'une grande famille d'avocats de mélanger les genres.
Prenons
20 000 lieues sous les mers : le professeur Aronnax rencontre certes le capitaine Némo et son Nautilus, merveille de technologie, mais sa quête le conduit dès le départ à rechercher un poulpe géant digne des mythologies. Et lui et Némo vont finalement le découvrir. C'est entre autres ce mélange bien particulier entre mythologie et technologie, mystère des terres – ou fonds sous-marins – inconnu(e)s et avancées scientifiques qui confère à l'œuvre de Verne ce charme si particulier. Voyage au Centre de la Terre en est un autre exemple, puisque c'est de nouveau un groupe de scientifiques qui finit par découvrir des animaux préhistoriques – tout auréolés de la magie d'avoir su traverser la nuit des temps.


Isaac Asimov

L'exemple plus récent d'Isaac Asimov peut paraître incongru, tant l'écrivain en question est quant à lui l'un des fers de lance de la science-fiction. Ses
lois sur la robotique ont fait autorité pendant longtemps et demeurent une référence incontournable. Toutefois, l'homme a lui-même jeté des passerelles avec un genre bien précis : le roman policier.

C'est ainsi que dans
Les Cavernes d'Acier et Les Robots de l'Aube, l'inspecteur Elijah Bailey va-t-il faire équipe avec le robot R. Daneel pour démêler plusieurs enquêtes policières. De cette association naîtra une complicité bien particulière, l'un des attraits de ces inoubliables livres. Le plus remarquable, c'est sans doute qu'à aucun moment ces enquêtes ne semblent incongrues dans un univers de science-fiction.


A.E. Van Vogt

Si Alfred Eton Van Vogt est aujourd'hui un écrivain de science-fiction peu connu du grand public, il n'en est pas moins le précurseur de la série de films à succès
Alien avec sa nouvelle Black Destroyer, qu'il a un peu plus tard adapté en un roman titré La faune de l'espace (The voyage of the space beagle). Dans Black Destroyer, un alien appelé Coeurl et ressemblant à une panthère dotée de tentacules sur les épaules s'en prend à un équipage de scientifiques. La nouvelle est particulièrement sanglante. Elle mêle adroitement science-fiction et fantastique/horreur, de la même manière que le film Alien.

Du même auteur,
Créateur d'univers présente une toute autre forme de panachage : celui entre la SF, toujours, et… la psychanalyse ! Transporté dans le futur après avoir involontairement tué une jeune femme lors d'un accident de la route, le capitaine Cargill se voit condamné à mort par un tribunal réuni à la demande d'une descendante de la victime. En effet le traumatisme lié à la mort de son ancêtre s'est répercuté jusqu'à elle et la descendante estime avoir subi un très grave préjudice. Ce scénario peut sembler farfelu, pourtant des études récentes menées par des psychothérapeutes, et en particulier Anne Ancelin Schützenberger corroborent l'hypothèse selon laquelle des événements traumatiques peuvent se répercuter sur plusieurs générations, laissant des traces bien des années après qu'ils aient eu lieu. Dans son ouvrage Aïe, mes aïeux ! Anne Schützenberger va même jusqu'à comparer ces événements traumatiques aux conflits entre nations et aux antagonismes d'aujourd'hui enracinés dans le passé.


Jack Vance

L'un des auteurs les plus renommés des univers de l'imaginaire est aussi celui qui a fait du mélange des genres l'une de ses spécialités : je veux parler de Jack Vance. Son magistral cycle de
Lyonesse, œuvre de fantasy s'il en est, ose pourtant une incursion dans un univers évoquant la science-fiction. Ainsi quand le maléfique magicien Visbhume ouvre une brèche sur un autre monde nommé Tanjecterly, celui-ci, et bien que la technologie y soit absente, rappelle davantage la SF que la fantasy. En effet, si dans les œuvres de fantasy il est courant que des magiciens se transportent dans des mondes parallèles, ici ce sont les descriptions de Vance des lieux et créatures qui font penser à de la SF. Avec le cycle du Tschaï, le phénomène s'inverse. Le roman débute comme de la science-fiction classique, le héros nommé Adam Reith se trouvant dans son vaisseau Explorator IV. Mais à partir du moment où il échoue sur la planète Tschaï, Adam va se retrouver confronté à une tribu barbare digne de celles de Robert E. Howard et à des créatures aliens aux pouvoirs étranges, les Pnumes, Chaschs et autres Dirdirs. Ce mélange entre SF et Fantasy est encore plus flagrant chez Vance avec sa geste des Princes-Démons.
Loin de s'en tenir au progrès technologique ou à la magie féerique, Vance aborde d'autres sujets dans ses œuvres. Notamment la religion et les différents dogmes philosophiques, qui apparaissent notamment dans
Cugel l'Astucieux, Cugel Saga et le cycle de Lyonesse.
De prime abord, ces sujets pourraient paraître arides, voire rédhibitoires. Il n'en est rien cependant. Pour prendre l'exemple de
Lyonesse, qu'il s'agisse du Jardin de Suldrun, de La perle verte ou de Madouc, les valeureuses tentatives du prêtre de Rome Umphred pour convertir au catholicisme les habitants des Isles Anciennes sont de grands moments de réjouissance.
Sur les nombreuses aventures que vivent ses personnages principaux, plus souvent qu'à leur tour confrontés à la cupidité humaine, Jack Vance semble porter un regard amusé. Il ressort de ses romans une philosophie humaniste où l'auteur, loin de se risquer à porter un jugement sur ses personnages, dévoile leurs défauts d'un ton badin et de manière humoristique. C'est sans doute ce qui rend cet écrivain atypique, ancien marin de la marine marchande, si plaisant à lire.
Philosophie humaniste, intérêt pour les religions et dogmes, on mesure donc à quel point son œuvre se distancie des idées préconçues sur la science-fiction et la fantasy.


Le mélange des genres dans la bande dessinée : un touche-à-tout nommé Edgar P.Jacobs

S'il est un scénariste-dessinateur qui symbolise à mes yeux le mélange des genres, c'est bien Edgar P. Jacobs. Jugez-donc : dans une même série, Black et Mortimer, il cumule l'anticipation avec le Secret de l'Espadon – si l'histoire se déroule de nos jours, l'espadon n'en est pas moins une arme futuriste – la magie et l'ésotérisme avec Le Mystère de la Grande Pyramide et les pouvoirs occultes du grand prêtre d'Akhénaton, l'intrigue policière avec L'Affaire du Collier – en fait, la plupart de ses BD prennent la forme d'enquête policière mais c'est cette dernière qui est à mon avis véritablement typée polar – et le fantastique avec La Marque Jaune qui pourrait presque être une transposition du roman de Mary Shelley, Frankenstein.
Dans
le Piège Diabolique, le cumul des genres atteint son paroxysme, puisque Mortimer est tour à tour transporté à l'époque préhistorique puis moyenâgeuse et enfin futuriste.
Etant l'objet d'autant d'influences différentes, la série Blake et Mortimer avait toutes les chances de se transformer en soupe indigeste. Bien au contraire, il s'agit de l'un des chefs-d'œuvre de ce qu'il est convenu d'appeler le neuvième art. Sans doute grâce à cette étonnante alliance entre une imagination enflammée, une manière très littéraire d'aborder la BD et une rigueur quasi-scientifique qui chez Jacobs fait penser à Jules Verne.


Le mélange des genres au cinéma : l'exemple Star Wars

Relancé par les trois nouveaux épisodes – qui sont en fait des préquelles, des histoires avant l'histoire – de
Star Wars, le phénomène de novélisation bat actuellement son plein. Si la démarche est typiquement à visée commerciale et lucrative, elle peut néanmoins donner naissance à des ouvrages intéressants, comme ceux de Timothy Zahn.

Il serait bien entendu terriblement réducteur de limiter l'influence de
Star Wars sur la littérature aux seules novélisations : le film a marqué des générations, sans doute davantage celles de 1977 et des années 80 que des années 2000, mais tout de même. D'où lui vient donc son succès ? Certainement de la fusion détonante entre SF et fantasy, dont l'un des aspects les plus significatifs est la présence de monstres côtoyant des robots dont la quantité semble augmenter de manière exponentielle entre les épisodes 4, 5 et 6 et les épisodes 1, 2 et 3. Déjà en son temps avec les combats au sabrolaser, la première trilogie associait étroitement des thèmes liés à la chevalerie à la science-fiction. On peut même estimer que si la Force tire sa source de la spiritualité extrême-orientale, elle n'en est pas moins une forme de magie. Elle est en tout cas ressentie comme telle par ceux qui en sont victimes – Luke lorsqu'il a affaire à l'Empereur, par exemple. Les deux univers, le technologique et le mythologique (pour ne pas dire le magique) se nourrissent l'un de l'autre avec une telle vigueur que de cette étrange synergie est né l'un des plus grands succès de l'histoire du cinéma.


Le jeu vidéo à la pointe des nouveaux genres


Comme vous pourrez vous en apercevoir en vous rendant sur ce
site Internet, les genres littéraires ont à leur tour donné naissance à des sous-genres. Le jeu vidéo, perpétuellement à la recherche de nouveaux territoires à défricher, s'est engouffré dans la brèche. Planescape Torment en est un bon exemple. A l'origine, Planescape Torment est un univers particulier du jeu de rôle Advanced Dungeons & Dragons. Un univers qui est en fait un multivers, croisement entre des centaines de dimensions différentes, où la technologie la plus baroque côtoie la magie. De ce multivers est né un jeu vidéo, qui à son tour a donné naissance à une novélisation.
Autre jeu situé dans un univers à la croisée des chemins,
Arcanum. Ici, nous avons affaire à de la steam-fantasy, genre bien particulier où la magie anciennement en vigueur décline peu à peu pour laisser place à la technologie – cette tendance à montrer un déclin ou effacement des créatures mythologiques et de la magie existe depuis que J.R.R Tolkien a décrit dans Le Seigneur des Anneaux l'affaiblissement et l'exode des elfes vers les Havres Gris et leur départ de la Terre du Milieu à la fin du Troisième Age. La steam-fantasy, si elle peut donner l'impression de « manger à tous les râteliers » ne s'inscrit pas moins dans un cadre remarquablement défini et typé.
Beaucoup plus connue du grand public qu'
Arcanum et Planescape, la série Final Fantasy s'est vendue à des millions d'exemplaires depuis sa naissance jusqu'à aujourd'hui. Là encore, il est question d'hybridation entre magie et technologie. Les univers développés sont entièrement imaginaires, mais peuvent tout aussi bien comprendre des villes industrielles que des terres sauvages habitées par des créatures magiques ou des esprits et autres forces élémentaires de la nature.
Le mythe de Gaïa développé par Hironobu Sakaguchi se retrouve très présent dans les épisodes VII et IX et dans Final Fantasy, le film. Ce dernier a comme
Planescape Torment fait l'objet d'une novélisation. Ainsi un jeu vidéo peut-il se faire l'écho dans un film puis dans la littérature d'une pensée philosophique… et balayer les idées reçues !



Conclusion


Sachant que les genres sont si souvent battus en brèche, que des influences infiniment plus diverses et variées que celles que j'ai tenté de retracer ici imprègnent tous les livres, il serait tentant de demander à ce que tombent les barrières entre les genres. Néanmoins soyons clairs : d'un point de vue commercial, cela s'avèrerait désastreux. Comment peut-on penser qu'un magasin proposant tous les types de vêtements au même rayonnage, laissant aux clients le son de faire le tri, pourrait survivre ? De la même manière, regrouper tous les livres sur un même rayonnage conduirait indubitablement à une forte décrue des ventes.

D'un point de vue moins terre-à-terre, on peut considérer que la création de genres spécifiques permet d'aller plus loin dans certains domaines, en reconnaissant rapidement ce que d'autres ont fait avant nous. Il importe donc d'appréhender chaque genre comme un espace de liberté et non comme un espace limité. En définitive, les barrières ne sont jamais aussi utiles que quand elles peuvent être transgressées, permettant aux genres littéraires de s'alimenter les uns les autres. Et quel que soit celui auquel elle appartient ou bien le contexte dans lequel elle s'inscrit, une bonne histoire reste une bonne histoire, non ?


Emmanuel Guillot
Littérature de genre


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